lundi 25 avril 2011

La position sur la Libye a brisé le consensus des Algériens sur la politique étrangère-- Abdelaziz Rahabi : Bouteflika a résumé la diplomatie à sa personne

Dirigée depuis El Mouradia, la diplomatie algérienne souffre aujourd'hui d'un manque de liberté dont elle devrait pourtant bénéficier pour être efficace. Le constat est celui d'un ancien diplomate et ex‑ministre de la Communication, Abdelaziz Rahabi. « La diplomatie algérienne n'est pas libre. Elle est directement contrôlée par le président de la République », indique‑t‑il dans un entretien publié ce lundi 25 avril sur TSA Arabi. « Même les télégrammes, autrefois écrits par un chef de cabinet au ministère des Affaires étrangères, sont aujourd'hui faits par le cabinet du président », ajoute‑t‑il.
 
Selon Abdelaziz Rahabi, aucun diplomate ou responsable au sein du département des Affaires étrangères ne peut s'exprimer sur un sujet sans en référer au président de la République en personne. « Aujourd'hui, Bouteflika a résumé la diplomatie à sa personne », accuse‑t‑il.
 
Pour lui, ce n'est pas Abdelaziz Bouteflika qui a replacé l'Algérie sur la scène internationale. D'ailleurs, explique‑t‑il, « l'Algérie n'a jamais été en dehors de la scène internationale. C'est peutêtre Bouteflika qui s'est replacé sur la scène internationale », lance‑t‑il. Pour étayer ses propos sur la mise à mal de la diplomatie algérienne, il donne l'exemple de l’Irak, du gel de l'Union du Maghreb arabe, des révolutions en Égypte, en Tunisie et maintenant en Libye. « L'Algérie n'a pas bougé le petit doigt... elle n'est d'ailleurs concertée en rien... on n'a pas de relations avec l'Afrique, Bouteflika s'est détourné de l'Afrique », a‑t‑il assuré. Avant de rappeler : « durant les années de crise, soit avant la venue de Bouteflika au pouvoir, aucun communiqué contre l’Algérie n’a été diffusé. (Pourtant), à cette époque, le pétrole était à 17 dollars. Il ne pouvait constituer un outil de pression ».
 
Interrogé sur la position algérienne quant au conflit libyen, M. Rahabi a affirmé que « beaucoup de problèmes en Algérie » pourraient voir le jour à cause de cette question. « Le consensus des Algériens sur la politique étrangère a été brisé (...) Il n'y avait pas une position claire. Aussi, Il fallait tenir les citoyens régulièrement au courant (...) il fallait impérativement qu'on soutienne ces révolutions », poursuit‑il.
 
Selon lui, le peuple algérien paiera certainement le prix de cette politique étrangère. « Kadhafi est fini (...) l'histoire retiendra que l'Algérie n'a pas soutenu la révolution populaire en Libye, ni en Égypte ou en Tunisie (...) les responsables (algérien, ndlr) croyaient en la résistance des dirigeants qui ont été finalement chassé », fait‑il constater. Il est nécessaire aujourd'hui, selon M. Rahabi, d'avoir des relations avec le « groupe de Benghazi ».
 
 
Il n'y a aucune volonté pour l'ouverture du champ audiovisuel en Algérie
L'ouverture du champ audiovisuel ne sera pas pour demain. Abdelaziz Rahabi ne semble pas avoir d'illusions sur ce point. « Le monde de la presse a besoin de l'application des lois qui existent déjà », lance‑t‑il. Et d'ajouter : « Je suis certain que ni le président de la République, ni les hauts cadres de l'armée n'ont une volonté d'ouvrir le champ de l'audiovisuel ».
 
M. Rahabi parle de rouerie dans ce sens. La classe politique lie, précise‑t‑il, l'ouverture du champ audiovisuel au privé. « L'ouverture des médias publics au peuple et à l'élite politique pourrait solutionner le problème. De sorte que le téléspectateur aurait vraiment l'impression d'être en Algérie et pas ailleurs », ajoute‑t‑il. M. Rahabi est également revenu sur le monopole de la publicité publique par l’État « qui contrôle 12 milliards de dollars et les donne à qui elle veut », indique‑t‑il.
 
La seule chose qui peut expliquer la mise en place de ce genre de mécanismes et la fermeture du champ de l'audiovisuel est, pour lui, la peur de la transparence. « Ils ont peur de cette ouverture qui pourrait les dévoiler, les mettre à nu, les interroger : pourquoi avez‑vous géré ainsi les deniers publics et pourquoi vous comportez‑vous ainsi sur le plan diplomatique ? » affirme‑t‑il. A ce sujet, Abdelaziz Rahabi fait part de ses appréhensions concernant l'impact des médias étrangers, occidentaux et arabes, sur le citoyen en Algérie. 

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