mercredi 6 juillet 2011

Algérie- Réformes politiques Aït Ahmed sceptique sur "les capacités du régime à faire mieux que d’habitude"

Hocine Aït Ahmed est formel : le régime algérien, rompu à l’intrigue, n’a aucune volonté politique pour procéder à des réformes et aller vers la démocratisation du pays. Dans un entretien accordé, lundi 4 juillet, à « La Nation » (lire l’intégralité de l’entretien ici), Hocine Aït Ahmed s’est montré sceptique sur les capacités du régime à évoluer. « On en parle (des réformes, ndlr) à chaque fois qu’on ne sait pas que faire, quand il y a eu de vraies réformes, ils ont fait une guerre pour les stopper. Je reste sceptique sur les capacités du régime à faire mieux que d’habitude », a‑t‑il affirmé. « Vous croyez que c’est une question de propositions, d’idées novatrices, de programmes ambitieux ? Nous avons fait des propositions, des déclarations, des lettres, des mémorandums… », a‑t‑il observé.
 
Selon lui, les réformes relèvent d’abord d’une volonté politique. « Il manque la volonté de faire les choses sérieusement. Il ya trop de mensonges, de dribbles, de jeux malsains. Ce pays croule sous les manigances et les coups tordus. (…)  Les vrais décideurs ont toujours imposé le savoirfaire de la police politique, sans oublier le rôle et la longue expérience de Bouteflika  dans l’art de faire échec par la ruse et la violence à  toute possibilité de démocratisation. Quand il n’y a plus de confiance, il faut d’abord restaurer la confiance. On n’imagine pas un dialogue sans ce préalable.
 
Interrogé sur la démarche d’Abdelhamid Mehri qui a accepté l’invitation de la Commission Bensalah,  Aït Ahmed a répondu : « chacun à sa méthode ». Concernant sa propre position, il a promis de se prononcer  « quand il y aura du nouveau »« Pour l’heure, je n’en vois pas. La priorité pour moi reste dans la construction du parti, le rétablissement des liens entre militants, entre citoyens, entre forces sociales.  Et la poursuite du dialogue avec les partenaires engagés dans un effort sérieux et constant pour la démocratie et le changement de ce système de pouvoir. La lutte politique sous un régime autoritaire force au réapprentissage permanent de l’exercice politique. On ne devient jamais définitivement un militant politique. On doit chaque jour réapprendre à le devenir ou à le rester », a‑t‑il précisé.
 
Histoire : « Je laisse les bavardages aux bavards »
 
Interrogé sur son silence après les dernières déclarations concernant l’histoire du pays (en allusion aux propos du président Ahmed Ben Bella), Aït Ahmed a indiqué qu’il « laisse les bavardages aux bavards ». « Quel silence ? », s’est‑il interrogé. « L’histoire, on la fait d’abord, on l’écrit ensuite. Cela fait plusieurs mois que je travaille avec un groupe d’historiens français et algériens, jeunes et moins jeunes, sur ce que je sais et ce à quoi  j’ai participé dans l’écriture de la Révolution et de la guerre d’Indépendance. Cela je le dois à la mémoire de tous les patriotes et compagnons de lutte. De même que je le dois aux jeunes générations. Je laisse les bavardages aux bavards ».
 
Évoquant la situation sécuritaire, il s’est interrogé sur les auteurs des enlèvements et a relevé le développement de plusieurs formes de violences qui sont toutes liées, selon lui, « à la corruption dans l’administration et les services  en charge de la sécurité des citoyens ».  « Le grand banditisme, la drogue, les trafics en tous genres ne se développent pas à cette échelle dans un pays à l’encadrement sain », a‑t‑il dit.
 
Concernant la situation en Kabylie, le leader du FFS estime que le pouvoir cherche à isoler la région. Il a dénoncé indirectement les partisans de l’autonomie « En Kabylie, pour mieux casser cette région historiquement frondeuse et fortement politisée, le pouvoir aide à la promotion des fausses alternatives.  La dépolitisation est, sous la houlette du pouvoir, conduite par des barrons locaux qui tout en étant souvent de pures créations du régime,  tiennent un discours oppositionnel non au système de pouvoir mais au reste de l’Algérie. Le plus pervers dans cette histoire est que les mêmes officines qui veillent à la propagation d’un discours violemment antikabyle dans certains médias et cercles sont derrière certains des groupuscules qui développent  en Kabylie un discours antiarabe ».
 
Mais en dépit de cette lecture pessimiste de la situation, le leader du FFS se montre optimiste. « En ce 5 juillet nous n’avons à célébrer que ce que la détermination des  Algériens a pu préserver de toutes les entreprises destructrices du régime. Mais cette détermination  obstinée  qui a su résister à l’anéantissement colonial  sera, malgré tous les obstacles, capable de construire une alternative démocratique à ce régime insoutenable », a‑t‑il conclu.  

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