jeudi 20 janvier 2011

Issad Rebrab à Maghreb Emergent :


«l’importateur est beaucoup plus favorisé que l’industriel »
rebrab
Rebrab: on ne libère ni le foncier, ni l'initiative!


En marge de la journée d’études sur la «performance de la distribution et du service après-vente » organisée aujourd’hui au Hilton par Ernst and Young, Issad Rebrab a répondu aux questions de maghrebemergent.info sur l’organisation du marché et sur les dernières décisions prises par les pouvoirs publics qu’il juge désavantageuse pour les producteurs. Une prime est donnée aux importateurs qui créent de l’emploi pour d’autres pays, regrette-t-il.


L’absence de circuits commerciaux efficaces  est l’une des causes de la prédominance de la spéculation sur le marché national. Vous êtes entrain de mettre en place une logistique de distribution  à travers le territoire national. Quelles sont les difficultés que vous rencontrez ?
Le gros problème aujourd’hui  est la gestion du foncier. Nous voudrions bien faire autour d’Alger, sept Mall, des  centres commerciaux avec des supermarchés, des boutiques, des espaces de loisir pour les familles et les enfants. Mais aujourd’hui on n’arrive pas à rencontrer le wali d’Alger pour lui faire des propositions. Tout autour d’Alger il y a du foncier, le problème est qu’on ne libère pas le foncier et encore moins les initiatives.
Où en sont vos investissements en matière de circuit de distribution et de centrales logistiques ?
Cevital est entrain de réaliser des centrales logistiques un peu partout sur le territoire national. La première se trouve au niveau de Bouïra,  elle est d’une surface couverte de 80 000 M2 sur un terrain de 16 hectares. Nous comptons réaliser une autre de la même taille à Constantine. Nous comptons également construire une autre centrale logistique à Sig et dans d’autres régions. Mais il s’agit là de plateformes étoiles qui vont être situées à proximité des centres commerciaux que nous voulons réaliser.

Croyez-vous que ces centrales logistiques ou d’achat permettront d’organiser le marché ?
C’est sûr. Si on avait ce genre d’infrastructures commerciales, nous irons obligatoirement vers la transparence des transactions commerciales. Cela pourra même absorber les circuits informels. Pour cela, il faut aussi donner une plus grande marge bénéficiaire aux distributeurs incluant grossistes ou détaillants. Aujourd’hui, on donne à ces distributeurs un ou deux pour cent de marge et on leur demande de payer une TAP de un ou deux pour cent également. De cette manière, on pousse les gens vers l’informel. Par exemple, quand nous avons baissé les prix du sucre à Cevital , c’était nos anciens prix moins ce que l’Etat a diminué comme  taxes, c’est à dire les 20% de douanes. Pour Cevital, donner suffisamment de marge  aux circuits de distribution les incitera à quitter l’informel. Certains de mes confrères ont voulu donner 10 DA le kilo de sucre pour toute la chaîne de distribution, c’est-à-dire le distributeur, le grossiste, le demi-grossiste et le détaillant. J’ai dis qu’il était impossible de faire fonctionner le circuit commercial avec une telle marge. Les commerçants ne pourront même pas payer leurs taxes. Donc on va pousser les commerçants à rester dans l’informel. Il faut donner suffisamment de marge aux gens et laisser la concurrence se faire.

Pensez-vous que la réglementation actuelle favorise le commerçant au détriment de l’industriel ?
L’importateur est beaucoup plus favorisé que l’industriel. Quand on diminue 52% de droits et taxes sur l’importation du sucre blanc et sur le sucre roux qui est une matière première, on  vous diminue seulement de 22%  pour les droits de douanes. Qu’est ce que cela veut dire ? L’importateur se contentera de commander un bateau de sucre et il l’écoulera sur le marché sans aucun risque, ni valeur ajouté sur l’économie nationale. Tandis que l’industriel permet de réduire la facture alimentaire au pays. En 2010, nous avons économisé au pays au moins 300 dollars la tonne grâce au raffinement au niveau local. Cela correspond à 360 millions de dollars, rien que pour l’année 2010. En outre, nous employons 21 000 personnes et nous créons des milliers d’autres emplois indirects. Nous faisons faires des étiquettes chez des confrères, de l’emballage aussi et plein d’autres services qui créent de l’emploi et de la richesse à l’Algérie. Par contre les importateurs créent des emplois pour d’autres pays.
Les importateurs seraient-ils devenus si puissants au point d’influer sur la décision économique ?
Il y a effectivement certains importateurs qui ont des sponsors qui les soutiennent, c’est certains… Enfin, j’imagine… sinon comment voulez vous expliquer que de telles décisions et de telles lois économiques soient adoptées et mises en place.  Malheureusement, avec de l’argent ces importateurs peuvent tous se permettre. Et vous connaissez la réalité du pays.
PAR SALIM HAIROUZ    JEUDI, 20 JANVIER 2011 16:39   

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