vendredi 18 mars 2011

Et l'ONU ressuscita le droit d'ingérence

La résolution de l'ONU autorisant une intervention militaire en Libye signe le retour du "droit d'ingérence". Un concept rebaptisé "devoir de protéger" pour mieux se prémunir des critiques.  
Et l'ONU ressuscita le droit d'ingérence Coup de théâtre à l’ONU. Jamais dans l’histoire des Nations unies une décision aussi lourde de conséquences n’a été prise aussi rapidement. Tout le poids de cette résolution de six pages réside dans le fait qu’elle "autorise les États membres [...] à prendre toutes les mesures nécessaires [...] pour protéger les civils et les zones peuplées par des civils". En clair, les avions américains, britanniques et français pourront frapper où ils veulent dès lors qu’ils estiment que la vie d’un civil est en danger.

On croyait le projet d'une zone d'exclusion aérienne ("No Fly Zone") mort et enterré. Non seulement il renaît mais il revient en force. La seule limite posée à l’intervention militaire est "une force étrangère d'occupation sous quelque forme que ce soit dans n'importe quelle partie du territoire libyen". Pour le reste, la voie est libre aux avions et aux missiles.
Tout semble indiquer qu’une intervention militaire est imminente. Les avions britanniques et français pourraient être aux avant-postes avec un soutien américain et une participation, à haute valeur symbolique, d’un ou plusieurs pays arabes. En pointe dans la phase diplomatique, le gouvernement français semble pressé de lancer les opérations militaires. Les frappes pourraient intervenir "dans quelques heures", a précisé le porte-parole du gouvernement, François Baroin, quelques heures après l'adoption de la résolution onusienne.
Le temps presse
Les objectifs ? On peut difficilement instaurer une "No Fly Zone" en quelques heures. C’est d’ailleurs pour cela que le président américain, Barack Obama, a finalement décidé de rallier les Britanniques et les Français à l’idée de frappes ciblées non directement liées à l’exclusion aérienne. Si la communauté internationale estime que le temps presse pour éviter un massacre à Benghazi, elle devrait rapidement envoyer un signal fort au dirigeant libyen, Moummar Kadhafi.
La semaine dernière, les autorités françaises évoquaient à mots couverts trois cibles potentielles : l’aéroport militaire de Syrte, à 500 kilomètres à l'est de Tripoli, celui de Sebha, dans le sud du pays, près de la frontière tchadienne, et Bab al-Azizia, centre de commandement de Kadhafi à Tripoli. Ces trois cibles font certainement partie des plans qui circulent dans les états-majors.
C’est un retour en force du "droit d’ingérence" rebaptisé "devoir de protéger". Un retour en force de la tant décriée "communauté internationale". Un retour en force de Barack Obama qui, comme à son habitude, a pris son temps au risque de paraître indécis. Un retour en force enfin de la diplomatie française, très critiquée la semaine dernière par ses partenaires européens pour sa précipitation. Son obstination, avec le soutien de Londres, a fini par payer.
L’ONU a ainsi décidé de faire la guerre à la Libye. Car c’est bien une logique de guerre qui est engagée. Au nom de la défense des populations civiles. Une décision vite ficelée, mais qui aura, à n’en pas douter, des conséquences à long terme dans l’ensemble du monde arabe. L’avenir d’une Libye coupée en deux sera évidemment source d’inquiétudes. Mais la résolution 1973 est d’abord un avertissement aux autocrates et une forme de soutien à la révolte des peuples arabes, trois mois jour pour jour après l’immolation d’un jeune chômeur tunisien nommé Mohamed Bouazizi.Analyse de Jean-Bernard Cadier, chroniqueur à FRANCE 24.

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