vendredi 11 mars 2011

Maroc: après le discours du Roi, le peuple attend des actes

Longtemps silencieux, le Roi a prononcé un long discours à la nation le 9 mars, annonçant une profonde réforme constitutionnelle. Significatif mais pas suffisant pour satisfaire les « leaders du 20 février » qui attendent plus de garanties sur ces réformes et leurs préoccupations sociales.Le Roi n’a pas annoncé de révolution mais une évolution politique majeure. Il n’empêche, beaucoup d’inconnues. Le débat sur la réforme constitutionnelle avait déjà marqué le début du règne de « M6 » avant de réapparaître il y a deux ans. Jusqu’ici, malgré les discours et les quelques réformes constitutionnelles déjà adoptées, le Roi gouvernait seul, disposant de toute latitude pour promulguer les lois. Enclenché, le processus de démocratisation semble irréversible. La question du rééquilibrage des pouvoirs suffira-t-elle, pour autant, à satisfaire les nouvelles générations beaucoup plus portées sur les questions sociales, les inégalités, le chômage massif qui les touche, la corruption etc. 
Les critiques fusent déjà, dénonçant les « oublis » du Roi. Oussama El-Khlifi, un des animateurs du mouvement « Jeunes du 20 février » initiateur des manifestations pour des réformes politiques en profondeur.
interrogé par Algérie Presse Service a déclaré que le roi « n’évoquait pas dans quel cadre allaient s’effectuer ces changements annoncés » en se demandant « est-ce que le projet s’inscrit dans une monarchie parlementaire que nous revendiquons? ».

Les Marocains ne sont pas des sujets mais des citoyens
Dans un royaume où tout est symbole, Karim Boukhari, éditorialiste à Telquel, en appelle à une révolution symbolique, la suppression du baisemain : « il est impératif de supprimer un anachronisme aussi “coûteux” que le baisemain. C’est aussi important que de lutter contre le chômage ou l’analphabétisme. En 2011, le lien d’autorité qui relie le roi à ses « sujets » a besoin d’être redéfini. Ça urge. Pourquoi ? Parce que les Marocains ne sont pas des sujets mais des citoyens. Ils n’appartiennent à personne mais à eux-mêmes. Et ils ressemblent, en cela, à tous les citoyens du monde, libres et affranchis ».
Au delà des questions politiques et symboliques, si « M6 » a semé le doute au sein du mouvement qui s’interroge sur les suites, il a fait l’impasse sur la mainmise du royaume sur les médias privés et l’économie « Au travers d’une holding qu’il contrôle, l’Omnium nord africain (ONA), le roi, et plus largementt la famille royale, contrôle de nombreuses entreprises (Wana, troisième opérateur téléphonique du pays, Attijariwafa Bank, première banque du Maroc et septième d’Afrique, etc.). L’ONA intervient par ailleurs dans d’autres secteurs (agroalimentaire, assurance, immobilier, distribution : les voitures Peugeot et Citroën sont commercialisées via une société contrôlée par l’ONA qui est par ailleurs actionnaire de Lafarge Maroc). Ainsi, avec l’ONA, Attijariwafa Bank et la Caisse des dépôts (dont le directeur général est nommé par le roi), une partie importante de l’économie est contrôlée par le palais » écrivait récemment le juriste Jad Siri sur le blog de l’Observatoire de la Transition Démocratique au Maroc.
Une confiscation de l’économie du pays par le monarque qui, pour le coup, rappelle les exemples des autocrates multi-milliardaires Ben Ali, Moubarak et Kadhafi…
(marianne2.fr)

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