lundi 13 juin 2011

Algérie--Amnistie générale, exilés du FIS : 2 dirigeants islamistes rencontrent un émissaire de Bouteflika


Amnistie générale, retour des exilés et autres bannis et réactivation du FIS-dissous. Ce sont les trois questions autour desquelles se déroulent présentement des négociations entre un clan du pouvoir et des animateurs de la mouvance islamiste. Secrétaire général du FLN (Front de libération nationale), Abdelaziz Belkhadem a la caution du président Bouteflika pour mener à terme ses tractations avec principalement deux interlocuteurs Hachémi Sahnouni et Abdelfateh Zeraoui, dirigeants du Front Islamique du Salut (FIS, dissout en mars 1992. Ces derniers ont rencontré jeudi un émissaire du pouvoir pour lui remettre une nouvelle lettre à Bouteflika.


Confortés et encouragés par les propos de Abdelaziz Belkhadem, représentant personnel du président Abdelaziz Bouteflika à propos de la libération des islamistes en prisons lorsqu’il a reconnu être en « mission officielle » sur ce dossier, les deux initiateurs de ce projet ont donc remis cela.
Dans une seconde lettre adressée au président Bouteflika (la première a été envoyée en mai dernier), les deux anciens du parti d’Abassi Madani et d’Ali Belhadj recommandent au chef de l’état d’inclure dans son projet d’amnistie les islamistes algériens vivant à l’étranger en raison de la « tragédie nationale » qui a poussé à l’exode des centaines d’entre eux.
Cette lettre dont DNA a pu obtenir une copie a été remise jeudi 09 juin à 10heures du matin à l’hôtel Safir (ex-Alitti ), à Alger, au représentant de Bouteflika, Azzi Merouane. Avocat, ce dernier l’homme est en charge du dossier de la réconciliation nationale au niveau de la présidence de la république. Sa fonction ? Responsable de la cellule assistance judiciaire liée à l’application des mesures comprises dans la Charte portant réconciliation nationale.
Que contient celle nouvelle adresse ? Les islamistes réclament, dans le cadre de l’amnistie générale en cours de négociation, une grâce pour tous les exilés de l’ex-parti islamiste.
« Après avoir levée Monsieur le Président de la République l’état d’urgence (…) nous vous adjurons d’inclure les Algériens qui ont émigré ou ceux qui ont été forcés à l’émigration dans l’amnistie générale…», écrivent les deux rédacteurs.
Selon Abdelfateh Zeraoui, Azzi Merouane aurait même affirmé à ces deux interlocuteurs lors de la rencontre de jeudi à l’Aletti qu’il était probable que la nouvelle constitution puisse contenir une disposition permettant aux anciens islamistes de faire de la politique sous une bannière autre que celle du FIS.
Une amnistie générale pour des milliers de terroristes emprisonnés – on évoque le chiffre de 7000-, une grâce pour les exilés dont notamment Anouar Haddam celui qui avait revendiqué l’attentat contre le commissariat central le 30 janvier 1995 (42 morts) et un retour à la légalité du FIS sous une forme qui resterait à définir. La boucle est bouclée.
Pressions islamistes ou vrai projet qui devrait couronner la politique de réconciliation nationale de Bouteflika, nos informations accréditent plutôt la thèse que la présidence pilote réellement cette initiative en confiant à Belkhadem le soin de la mener à son terme.
Certes, le Premier ministre Ahmed Ouyahia dont les prérogatives au terme de la constitution de 2008 ne dépassent pas le cadre du « coordinateur » du gouvernement a démenti catégoriquement lors d’un point de presse toute action visant à une amnistie générale. Mais il semblerait qu’Ahmed Ouyahia ne soit pas associé à cette démarche.
A preuve, ce démenti a été très vite démenti par les propos du représentant personnel de Bouteflika, Abdelaziz Belkhadem. Celui-ci a affirmé quelques jours plus tard dans les colonnes du confrère El Djazair News que l’initiative de Hachémi Sahnouni et de Abdelfateh Zeraoui Hamdach avait bel et bien reçu l’aval des plus hautes autorités du pays et que lui-même est en « mission officielle » sur ce dossier.
En effet, Belkhadem ainsi qu’un officier de l’armée avaient rencontré à quatre reprises à Alger Hachémi Sahnouni et Abdelfattah Zeraoui Hamadach pour déminer le terrain. Une de ses rencontres a été filmée afin qu’elle puisse être visionnée par le chef de l’Etat.
Cinq rencontres, deux lettres, une confirmation officielle, difficile dès lors de nier l’existence de ce projet d’amnistie générale. Pourquoi alors Ouyahia s’est-il empressé de démentir « formellement cette rumeur » ?
L’ambition présidentielle, sans doute. Ahmed Ouyahia et Abdelaziz Belkhadem nourrissant le rêve de succéder au président Bouteflika, aucun ne rate l’occasion de savonner la planche à l’autre
Pour le patron du FLN, estampillé islamo-conservateur, le soutien des islamistes serait un poids de taille dans la course à la magistrature suprême de 2014. Le premier tour de chauffe serait les législatives de 2012. Afin de bénéficier de ce soutien dans la perspective de ces deux rendez-vous électoraux, une amnistie générale pour les terroristes et les exilés ainsi qu’un retour à l’activisme des islamistes ne seraient pas un cadeau de trop.
Pour Ahmed Ouyahia, patron du RND, barrer la route à Belkhadem nécessite forcément que celui-ci soit privé d’une alliance stratégique avec les islamistes. D’où sans doute le démenti qui vise à torpiller le projet. En a-t-il les moyens ?
L’avenir très proche dira qui a raison et qui a tord sur cette question de l’amnistie générale, mais une chose est sûre les islamistes ont repris du poil de la bête et mènent d’ores et déjà campagne ouvertement pour leur candidat en 2014, Abdelaziz Belkhadem.


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