el cobra est de retour au trou !!!!!!!!!!!!!
En nommant ce mardi 4 septembre 2012 Mohand Oussaid Belaid comme ministre de la Communication à la place de Nacer Mehal, le chef de l’Etat aura désigné son 11eme ministre à la tête de ce département depuis sa prise du pouvoir en avril 1999. Onze ministres de la Communication en 13 ans, un record. Jamais depuis l’indépendance de l’Algérie en juillet 1962, un département ministériel n’a connu autant de valses, autant de titulaires.
Pourquoi ? Parce que le président a toujours voulu gérer la communication et contrôler les médias, souffre que les médias le critiquent, ne supporte pas l’idée que ce pouvoir puisse lui échapper.
Ce onzième remaniement au ministère de la Communication offre l’occasion de nous replonger au cœur d’un épisode, peu connu mais sans doute fondateur, qui remonte à juin 1999 au cours duquel le président a limogé son ministre de la Communication. Plongée dans un Conseil des ministres pas comme les autres.
Premier Conseil des ministres
Mercredi 29 juin 1999. Abdelaziz Bouteflika préside son premier Conseil des ministres. Remonté comme une pile contre les journalistes, le président se lancera dans une longue diatribe contre la presse de son pays.
Les journalistes ? Il ne l’apprécie pas du tout. Mais alors du tout. Quatre mois auparavant, au cours d’un meeting électoral organisé dans le sud du pays, ne les a-t-il pas traités de tayabate el hammam (commères des bains maures) ?
Et ce mercredi 29 juin, l’occasion est trop belle pour la dézinguer une fois de plus cette presse et de régler son compte à ce ministre de la Communication, Abdelaziz Rahabi.
Trop ami avec les journalistes, trop généreux avec les médias, trop conciliant avec ces commères, M. Rahabi en aura pour son compte.
Dans le bureau présidentiel
Les hostilités du président contre la presse, contre ce ministre qui dépareille avec le reste des membres du gouvernement, commenceront avant même la tenue de ce conseil des ministres. Dans le bureau présidentiel d’abord.
Selon les usages protocolaires, le chef de l’Etat s’entretient avec son Chef du gouvernement, Smail Hamdani, avant d’élargir la réunion au reste du gouvernement.
L’entrevue dure presque une heure. Les deux hommes abordent les questions inscrites à l’ordre du jour du Conseil. Dans son bureau, Bouteflika se montre particulièrement préoccupé par un seul sujet : la communication. Pourquoi ?
Parce qu’il juge que la manière avec laquelle est géré ce département ne correspond absolument pas à sa conception de la communication. Face à son chef du gouvernement, il critique violemment la presse privée et considère le ministre de tutelle comme l’allié de ces journaux qui ne cessent de le pourfendre avant même qu’il ne soit officiellement candidat à la présidentielle.
Le chef du gouvernement fait la moue
Bouteflika tranchant : « J’ai l’intention de récupérer le ministère de la Communication. »
Smail Hamdani, fait la moue, s’y oppose avec tact, mais fermement : « M. le Président, je suis très satisfait du travail de mon ministre. Nous n’avons pas de problèmes avec la presse et je n’ai pas à me plaindre de lui. »
Bouteflika attaque encore, mais cible cette fois-ci : « Rahabi est l’ami de la presse, ce n’est pas mon ami. Il l’a aidée matériellement. Il ne peut pas être mon ami.»
Smail Hamdani est gêné par ces remarques, mais rien n’y fait. Il sait qu’il ne peut pas s’opposer au chef de l’Etat.
Le Président a déjà pris sa décision. Il l’annoncera dans les minutes qui suivront cette rencontre. Les deux hommes quittent le bureau pour rejoindre les membres du gouvernement.
Le président parle...
Bouteflika fait son entrée dans la grande salle. L’ambiance est quelque peu tendue. Il salue l’assemblée et prend la parole. Les usages protocolaires expédiés, le Président évoque longuement la loi sur la concorde civile. Le temps est venu, dit-il, pour que les Algériens se réconcilient entre eux.
Cette loi, explique-t-il, permettra aux terroristes ayant décidé de renoncer à l’action armée de regagner leur foyer et de reprendre leur place dans la société algérienne. Ceux qui s’y conformeront pourront bénéficier de la clémence de l’Etat.
Emporté par son élan, Bouteflika se lance dans un long monologue sur la genèse du terrorisme qui frappe le pays depuis une dizaine d’années. « Si j’avais l’âge des terroristes, je serais certainement monté au maquis comme eux. »
...et choque
Les propos justifiant le terrorisme ne suscitent pas de réaction parmi les membres du conseil. Un seul ministre prendra la parole pour donner son point de vue. « Attention, dit-il, il faudra juger ces gens. Ils ont les mains pleines de sang». Sa mise en garde passe inaperçue.
Le président reprend la parole. De toutes les façons, dit-il, il fera aboutir son projet de loi. Il compte le soumettre dans les plus brefs délais aux deux chambres du Parlement avant d’organiser un référendum pour le faire approuver définitivement par le « peuple ».
Le pouvoir, Bouteflika entend l’exercer pleinement. « Je ne suis pas un président stagiaire comme celui qui m’a précédé. »
Pas un président stagiaire
Silence. Puis murmures et chuchotements. Celui qui l'a précédé?!
Certains ministres n’apprécient pas la réplique de Bouteflika et goûtent peu l’attaque perfide contre l’ancien président Liamine Zeroual, élu en 1995 et démissionnaire en 1998. « Il va trop loin. Il est indécent de s’en prendre ainsi à un homme qui a fait montre d’élégance en quittant le pouvoir», chuchote un ministre.
Encore plus remonté, Bouteflika se lance ensuite dans une violente diatribe contre la presse non gouvernementale qu’il accuse de s’opposer à sa politique de main tendue à la mouvance islamiste.
« La presse n’est pas reconnaissante de tout ce que je fais. Je ne comprends pas qu’on puisse aider des journaux qui nous tombent dessus tous les jours. Je ne comprends pas qu’on puisse aider une presse qui nous insulte tous les matins, une presse qui ne participe pas à la stabilisation du pays. »
Il tape du poing
Du poing, le président tape sur le pupitre, prend la pose, regarde ses ministres. Ses propos ? Ils visent indirectement Abdelaziz Rahabi.
Les regards se tournent vers celui-ci, mais Rahabi ne bronche pas. Diplomate, ancien ambassadeur au Mexique et en Espagne, homme fin, cultivé autant qu’il est pourvu d’un humour taquin, le ministre de la Communication écoute calmement le Président parler.
Et Bouteflika relance : « De toutes les façons, j’envisage de réformer totalement ce secteur. » Le chef du gouvernement qui subodore la décision, est mal à l’aise.
Le président prend un air grave, balaie la salle de son regard avant d’annoncer : « J’ai décidé de recouvrer les attributions du ministère de l’Information et de nommer M. Rahabi, que je ne connais ni en bien ni en mal, ministre conseiller auprès du Chef du gouvernement. La charge du ministère de la Culture reviendra désormais à M. Salaoundji, que je ne connais ni en bien ni en mal, et que je n’ai jamais vu auparavant. »
L’assistance est abasourdie. Bouteflika vient de limoger le ministre de la Communication en plein Conseil des ministres.
« Je suis là! »
Pendant un moment, la salle est plongée dans un long silence. Une voix s’élève du fond. Celle de Tidjani Salaouandji, ministre d’Etat aux Affaires étrangères. Il lève la main pour signaler sa présence. «Je suis là !», dit-il. Bouteflika le dévisage avant de lui signifier qu’il est choisi pour s’occuper uniquement du secteur de la Culture.
Le ministre de la Communication est rouge de colère. Il fulmine. Il veut répliquer aux accusations du Président, mais se retient. Il se retourne alors vers un collègue, assis à côté de lui : « Mais pour qui se prend-il ce président ? Je vais lui rentrer dedans tout de suite. »
Te voilà enfin débarrassé de Bouteflika
Son collègue le dissuade. Un éventuel échange entre le Président et son ministre peut dégénérer. « Ne lui réponds pas, lui souffle à l’oreille ce ministre qui connaitra plus tard le même sort. Te voilà enfin débarrassé de Bouteflika maintenant que tu es nommé conseiller auprès du Chef du gouvernement ! Tu t’es débarrassé de lui. Ce qui n’est pas notre cas. »
Le ministre de la Communication s’abstiendra de donner le change au président.
Ambiance morose
Le Conseil des ministres s’achève dans une ambiance morose. Bouteflika s’apprête à quitter les lieux sans mot dire. Il ne veut pas perdre son temps, pressé qu’il est de se rendre à une réception offerte dans une luxueuse villa d’Alger par Fatiha Boudiaf, épouse de Mohamed Boudiaf, président assassiné le 29 juin 1992.
Alors que le président allait quitter la salle, le Chef du gouvernement s’approche de lui. Il veut lui faire part d’une observation : la tradition veut que le chef de l’Etat salue les ministres avant de prendre congé.
Bouteflika est désarçonné par la remarque. Qu’à cela ne tienne ! Il s’exécute. Il passe devant ses ministres pour les saluer. Il s’attarde quelques secondes, un mot chaleureux pour les uns, taquiner les autres.
Arrivé devant le ministre de la Communication qu’il venait de limoger quelques minutes plutôt, le président tend la main. L’échange est glacial, mais Bouteflika se montre doux comme un chat : « Comprenez que je sois le seul porte-parole du gouvernement. »
Son désormais ex- ministre ne bronche pas. Il se retient devant ce Président qui, non seulement le critique, mais aussi le congédie sans aucune élégance devant ses partenaires. « Que Dieu vous en donne plus !», lui réplique le ministre de la Communication.
Lire l'article original : 13 ans, 11 ministres de la Com : Le jour où Bouteflika a décidé de vampiriser la Communication | DNA - Dernières nouvelles d'Algérie
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