Des documents déclassifiés de l’armée française dévoile l’étendue des retombées nucléaires des premiers essais de la bombe A dans le désert algérien.
Les documents de l’armée française de 1960, déclassifiés en 2013, montre que les effets radioactifs du premier essai nucléaire français dans le Sahara algérien ont été beaucoup plus importants que ceux admis à l’époque, s’étendant à toute l’Afrique de l’Ouest et au sud de l’Europe, selon une carte publiée vendredi 14 février par Le Parisien.
La carte militaire montre que jusqu’au treizième jour suivant l’explosion aérienne de la première bombe nucléaire française, Gerboise Bleue, le 13 février 1960, les retombées radioactives se sont étendues à toute l’Afrique de l’Ouest, au sud-est jusqu’à la Centrafrique, ainsi qu’au nord, sur la côte espagnole et la Sicile.
« Les militaires reconnaissent qu’à certains endroits les normes de sécurité ont été largement dépassées : à Arak, près de Tamanrasset, où l’eau a été fortement contaminée, mais aussi dans la capitale tchadienne de N’Djamena », selon Le Parisien (lire ci-dessous).
|
Le document choc sur la bombe A en Algérie
Des documents secret-défense montrent l’étendue des retombées radioactives des essais nucléaires français dans le Sahara au début des années 1960.
Le 13 février 1960, Gerboise bleue, la première bombe atomique française, explose dans le Sahara. Ce document détaille les retombées nucléaires radioactives dans les jours suivants.
C’est une carte qui fait froid dans le dos. Classée secret-défense par l’armée pendant des décennies, elle vient d’être déclassifiée dans le cadre de l’enquête pénale déclenchée par des vétérans des campagnes d’essais nucléaires français (dans le Sahara au début des années 1960, puis en Polynésie dans les années 1970).
Pour la première fois, le grand public découvre l’étendue exacte des retombées nucléaires radioactives des essais aériens réalisés par la France dans le Sahara algérien. Sur cette carte, que nous dévoilons aujourd’hui, les mesures de l’armée française montrent que, loin de rester cantonnées au désert, les retombées ont recouvert toute l’Afrique du Nord et même subsaharienne. On constate ainsi que treize jours après le tir de la première bombe aérienne française, la fameuse Gerboise bleue, des retombées radioactives atteignent les côtes espagnoles et recouvrent la moitié de la Sicile !
Des normes de radioactivité dépassées à certains endroits
Quelles étaient les doses enregistrées ? Dans les documents secret-défense, les militaires assurent qu’elles étaient « généralement très faibles » et sans conséquences. « Cela a toujours été le système de défense de l’armée », explique Bruno Barillot, spécialiste des essais nucléaires. C’est lui qui a analysé ces documents déclassifiés, obtenus par les associations qui ont porté plainte. « Sauf que les normes de l’époque étaient beaucoup moins strictes que maintenant et que les progrès de la médecine ont démontré depuis que même de faibles doses peuvent déclencher, dix, vingt ou trente ans plus tard, de graves maladies. »
Autre découverte, les militaires reconnaissent qu’à certains endroits les normes de radioactivité ont été largement dépassées : à Arak, près de Tamanrasset, où l’eau a été fortement contaminée, mais aussi dans la capitale tchadienne de N’Djamena. « La carte du zonage des retombées de Gerboise bleue montre que certains radioéléments éjectés par les explosions aériennes, tel l’iode 131 ou le césium 137, ont pu être inhalés par les populations malgré leur dilution dans l’atmosphère, explique Bruno Barillot. Personne n’ignore aujourd’hui que ces éléments radioactifs sont à l’origine de cancers ou de maladies cardio-vasculaires. »
Un accès restreint aux archives
Les associations de victimes souhaiteraient obtenir d’autres informations. « Mais pour l’instant, le fonctionnement de déclassification n’est pas satisfaisant, dénonce Bruno Barillot. Malgré la demande des juges d’instruction, l’armée n’a communiqué que des archives soigneusement triées, dans lesquelles il manque des pans entiers de données. Il faut réformer l’accès à ces informations si on veut connaître la vérité. » Une accusation réfutée hier par le ministère de la Défense : « Les documents ont été choisis par une commission consultative indépendante à laquelle l’armée ne participe pas », explique le service de communication.
Photo prise le 27 décembre 1960 près de Reggane dans le sud algérien, pendant la 3è explosion de la bombe A française dans le cadre des essais nucléaires aériens.C’est à Reggane que fut expérimentée la 1ère bombe atomique française le le 13 février 1960. Crédit : AFP
Essais nucléaires français en Algérie : Graves répercussions
Source : Le Parisien le 14 février 2014
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire