dimanche 7 février 2016

Algérie-Politique-FIS/ Révélations de Merani sur Beur TV : «Abassi Madani allait être limogé»


«Nous nous apprêtions à nous réunir pour limoger Abassi Madani suite à l’impasse dans laquelle il avait mis le parti et le pays».

L’ancien membre fondateur du FIS dissous, Ahmed Merani, a fait de nouvelles révélations lors d’une émission diffusée par la chaîne privée Beur TV. Ahmed Merani, qui a dû interrompre son 
intervention avant la fin de l’interview menée par un journaliste proche du FIS, a révélé qu’en juin 1991, au firmament de la crise politique, le conseil consultatif du parti islamiste allait démettre Abassi Madani de son poste de président.
«Nous nous apprêtions à nous réunir pour limoger Abassi Madani suite à l’impasse dans laquelle il avait mis le parti et le pays», a déclaré Ahmed Merani, qui a rappelé le contexte extrêmement tendu qui a régné durant la grève politique et l’occupation de la rue décidées par son ancien parti. «Il y avait eu une confrontation directe entre des militants du FIS et la police, et il y eut huit morts à Bab El-Oued et six à Bachdjarah», rappelle-t-il, en expliquant que les heurts avaient eu lieu lorsque les services de sécurité avaient décidé de remettre la devise des Assemblées populaires communales (Par le peuple et pour le peuple, ndlr) qui avait été retirée par les élus du FIS et remplacée par le slogan «mairie islamique». «Devant le grave risque de glissement, j’avais décidé de prendre langue avec les responsables politiques pour éviter le pire. J’avais alors contacté le conseiller du chef du gouvernement pour demander audience à ce dernier», affirme Ahmed Merani, qui assure qu’il a effectivement été reçu par Sid-Ahmed Ghozali. «Le chef du gouvernement ne m’a pas reçu seul. Il y avait avec lui le ministre de la Défense et le patron des services secrets, car la situation était grave et dépassait le seul chef du gouvernement», a précisé Ahmed Merani. Celui-ci soutient qu’il a demandé à ses interlocuteurs d’ordonner aux services d’ordre de se retirer pour éviter une nouvelle confrontation avec les militants du FIS et que le général Toufik lui a rétorqué que les services d’ordre devaient enlever les nouveaux frontons imposés par le FIS et remettre la devise de la République. Ahmed Merani a, par la suite, consulté les membres du madjliss echoura (équivalent du bureau politique), révélant qu’Abdelkader Hachani avait demandé à connaître ce que Merani avait pu «glaner» pour le FIS dans ce «deal». Ce à quoi Merani avait répondu qu’il ne cherchait pas à passer un accord avec le pouvoir, mais à calmer les esprits et éviter le pire. Selon Ahmed Merani, Abdelkader Hachani brandit alors une liste de revendications en affirmant qu’il fallait «aller vers l’escalade». Ce qui, selon Merani, fit réagir Bachir Fkih qui menaça d’aller à la télévision pour dénoncer à l’opinion publique les tentatives de certains membres de la direction du FIS de pousser le pays à la guerre civile. «Or, souligne Ahmed Merani, nous avions créé le FIS pour faire de la politique et non pas la guerre.» Les deux dissidents du FIS reprirent attache avec le chef du gouvernement et les responsables sécuritaires pour demander qu’il leur soit permis d’intervenir directement à la télévision pour dévoiler les velléités bellicistes des responsables du FIS. «Nous n’avons obtenu l’accord qu’après une longue attente. Nos interlocuteurs avaient exigé que l’émission passât en différé, mais nous avions refusé de peur que les autorités manipulent ou censurent nos propos. Puis, nous finîmes par obtenir l’accord et Bachir Fkih fit sa déclaration en direct à l’ENTV». C’était le début de la dissidence au sein du FIS et d’une escalade meurtrière voulue par certains dirigeants de ce parti extrémiste qui n’avaient pas l’intention de faire machine arrière, quoi qu’il en coûtât. «A ceux qui m’accusent d’avoir trahi le FIS, je réponds que les traîtres sont ceux qui ont fait dévier le parti de son objectif éminemment politique et qui ont encouragé le recours à la violence», a conclu Ahmed Merani, avant d’interrompre l’enregistrement de l’émission en raison du parti pris flagrant du journaliste de Beur TV en faveur du parti dissous.
Karim Bouali

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