dimanche 10 avril 2016

NPD: une course à la direction votée, Mulcair désavoué

Le verdict, impitoyable, est tombé dimanche après-midi: les membres du Nouveau Parti démocratique (NPD) ont poussé leur chef Thomas Mulcair vers la sortie.
La nouvelle a eu l'effet d'une bombe dans la salle du centre des congrès d'Edmonton où s'étaient réunis quelque 1800 délégués.
Cinquante-deux pour cent des militants ont demandé une course à la direction. Une majorité simple était requise pour que le NPD soit tenu d'organiser une telle course.

Avec un appui de seulement 48%, Thomas Mulcair est arrivé bien loin du seuil minimal de 70% qui avait été si souvent évoqué au cours des dernières semaines.
Il s'agit d'une défaite cinglante pour le chef sortant, qui a précisé dimanche qu'il resterait à la tête du parti en attendant le choix de son successeur.
La formation aura jusqu'à deux ans pour sélectionner un nouveau dirigeant.
Le leader du parti en Chambre, Peter Julian, s'est dit «surpris» de l'ampleur du désaveu.
«Je suis attristé, il n'y a aucun doute. Tom a fait un travail extraordinaire à la Chambre des communes. Stephen Harper serait toujours premier ministre si Tom n'avait pas fait ce travail», a-t-il lâché.


Plusieurs membres de la députation québécoise ont été secoués par la nouvelle; certains ont versé des larmes en quittant la grande salle du centre des congrès.

Lui aussi étonné par le faible score récolté par Thomas Mulcair, le député Matthew Dubé a rejeté l'idée que cela témoigne d'une division chez les néo-démocrates.

Philosophe, il a soutenu que la course à la direction permettrait un brassage d'idées qui aidera justement le parti à se renouveler.

«La beauté de la course, c'est que ça va nous permettre de continuer (de débattre) et décider dans quelle direction on veut aller pour l'avenir», a soumis M. Dubé.

Avant l'annonce des résultats, Thomas Mulcair y était allé d'un dernier plaidoyer auprès de ses troupes.

«Mes collègues néo-démocrates, des millions de Canadiens nous regardent. Ils comptent sur nous pour mener la bataille pour eux (...) Nous ne pouvons les laisser tomber», a-t-il plaidé.

«Si vous continuez à vous tenir debout à mes côtés, alors ensemble, nous ne cesserons jamais de nous battre. Alors tenez-vous debout avec moi», a enchaîné M. Mulcair.

Visiblement nerveux, le chef sortant a mis du temps à prendre ses aises sur scène, semblant avoir de la difficulté à contenir son émotion au début de son allocution.

Il a eu droit à un accueil poli et des applaudissements nettement plus timides que ceux qui retentissaient la veille dans la même salle lorsque la première ministre de l'Alberta, Rachel Notley, a pris la parole.

Il n'a évidemment pas eu le même succès électoral que la dirigeante néo-démocrate, qui a mis fin à 43 ans de règne conservateur dans sa province - sous la houlette de Thomas Mulcair, les troupes néo-démocrates ont été décimées le 19 octobre dernier.

Mais le député d'Outremont assurait que malgré ce cuisant revers, le parti demeurait une force politique considérable.

«Plus d'un million de Québécois considèrent toujours les valeurs néo-démocrates comme leurs valeurs, et nos 16 députés de partout au Québec sont là pour en témoigner», a exposé M. Mulcair.

«Bien sûr, nos attentes étaient plus élevées, mais nous restons malgré tout une force politique redoutable au Québec», a-t-il enchaîné.

Plusieurs membres du caucus néo-démocrate ont dit avoir apprécié le discours du chef sortant, qui reconnaissait lui-même que cet événement représentait un moment charnière de sa carrière politique.

«Il a livré un très beau discours. Il a parlé aussi avec émotion (...) Moi, je suis contente, parce que je sais que Tom est cet homme de coeur aussi», a analysé la députée Brigitte Sansoucy.

Mais pour d'autres, Thomas Mulcair n'avait tout simplement pas livré la marchandise.

«Il a démontré beaucoup de passion, mais à mon sens, il failli à la tâche de vraiment élaborer une vision positive de l'avenir du pays, l'avenir du parti», a exposé un délégué montréalais, Franklin Gertler.

Le militant a en outre reproché au leader sortant d'avoir voulu ménager la chèvre et le chou en éludant l'un des grands enjeux du congrès, le manifeste «Un bond vers l'avant», qui prône un délaissement des énergies fossiles.

La résolution de débattre des principes du texte, qui divise clairement les néo-démocrates de l'Alberta de ceux du reste du pays, été adoptée dimanche matin au congrès.

Les candidats à la succession de Thomas Mulcair pourrait donc se retrouver avec cet épineux dossier à gérer.

Mais on n'en est pas encore là, a insisté le député ontarien Charlie Angus.

«Ce qui ressort véritablement du congrès, c'est que notre parti veut aller de l'avant et qu'il a le désir d'être très impliqué dans le paysage politique canadien», a-t-il dit après l'annonce des résultats du vote.
MÉLANIE MARQUIS
La Presse Canadienne
Edmonton

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