lundi 14 mars 2011

Algérie- crise arabe.L’initiative Mehri : 1. Les dessous..et..



L’initiative Mehri : 1. Les dessous
Tout s'est joué après la fuite de Ben Ali et les premières rumeurs sur un départ de Bouteflika
De son exil suisse, Hocine Aït Ahmed, le fondateur du Front des forces socialistes, qu’on dit adversaire acharné de la caste militaire et infatigable partisan de la réconciliation avec les islamistes, saisit immédiatement après la chute de Ben Ali et les premiers affolements de Bouteflika, les conséquences catastrophiques qu’aurait un départ du président algérien : ce serait la fin du projet de « réconciliation » caressée depuis Sant’Egidio ; le tête-à-tête insoutenable avec les généraux ; l’émergence d’une Algérie nouvelle à la construction de laquelle les islamistes et les « réconciliateurs » n’auraient pas pris part et dans laquelle, craint-il, les généraux continueraient d’exercer le pouvoir.
Le chef du FFS sait que Bouteflika reste indispensable pour la famille « réconciliatrice ».

Depuis 1999, il existe, en effet, un accord non écrit entre le président Bouteflika, les partis signataires du contrat de Sant'Egidio et les chefs islamistes de l'ex-FIS pour exécuter l'accord de Sant'Egidio (rétablissement de l'ex-FIS et retour à la case 1992). Cette convention secrète, régulièrement bloquée par la caste militaire, repose essentiellement sur Bouteflika. Elle devait être mis en application dès l'entame du troisième mandat de Bouteflika.
Tenue secrète durant plusieurs années, la transaction fut dévoilée publiquement par le chef de l’Armée islamique du salut, Madani Mezrag en juillet 2007    puis par son adjoint Ahmed Benaïcha, l’ancien émir de la branche armée du FIS, en décembre de la même année, dans les colonnes du journal arabophone El Bilad : « Dès sa réélection en 2009, Bouteflika prononcera une amnistie générale et permettra au FIS de retourner sur la scène politique ; oui, le champ sera rouvert aux enfants du Front dans le cadre d’un parti politique », avait déjà révélé, en décembre, Ahmed Benaïcha, l’ancien émir de la branche armée du FIS, dans les colonnes du journal arabophone El Bilad.
L’ancien chef terroriste, en plus de reconnaître l’existence de l’arrangement politique entre l’ex-FIS et le président, avait ajouté: « Il y a en ce moment plusieurs initiatives pour donner corps à cette solution politique qui va faire l’objet d’un consensus entre les nationalistes et les islamistes. »
Cette solution politique, Benaïcha l’appelle « solution finale », celle qui solderait le contentieux de 1992 né de l’annulation des législatives remportées par les islamistes et de la dissolution du FIS. Elle prévoit une réhabilitation totale et publique du parti dissous et un progressif transfert de pouvoir. »
L’enjeu Bouteflika
Aussi, la fragilisation de Bouteflika à la suite de la chute de Ben Ali et de Moubarak avait-elle alarmé les islamistes, les réconciliateurs et tout un insoupçonnable monde  La riposte devenait capitale. Il faut sauver le soldat Bouteflika
Seul moyen : faire capoter le mouvement de protestation, affaiblir la CNCD et surtout, jeter une bouée à Bouteflika.
Le 4 février, Hocine Aït Ahmed donne ordre au FFS et au RAJ de quitter la CNCD
Le 20, il fait la même demande à Mostefa Bouchachi, un des fondateurs de la CNCD, proche du FFS, qui se retire. la Coordination nationale pour le changement et la démocratie (CNCD) a bien éclaté, sous l’influence des partis politiques, entre partisans de Sant’Egidio et « éradicateurs », autour de l’enjeu Bouteflika : le changement se fera-t-il avec ou sans Bouteflika ?
Et voilà Mehri !
Mais Ait Ahmed avait surtout compris que Bouteflika avait besoin d’un appui partisan pour se redéployer.
Cet appui viendra d’ Abdelhamid Mehri, ancien secrétaire général du FLN et cosignataire du contrat de Sant'Egidio
 Le 16 février, Mehri adresse une lettre ouverte à son « frère » Bouteflika lui proposant une sortie de crise et lui demandant d'employer l'année qui sépare l'Algérie du 50e anniversaire de son indépendance à « préparer le changement pacifique souhaité ».
Cette "transition démocratique" formulée par Sant'Egidio suppose donc le maintien de Bouteflika ( et donc la mise à l'écart des généraux dont Toufik ainsi que la nomination d'un chef de gouvernement proche des réconciliateurs d'où le nom de Hamrouche qui circule à Alger)
Dans ce scénario, le premier point à retenir est le maintien de Bouteflika à son poste au moins jusqu’en juillet 2012 
D’où l’incroyable dédoublement de Mostefa Bouchachi
L’ancien Bouchachi – dont il convient, en dépit de tout, de respecter le parcours et l’opinion - avait le verbe haut et le regard déterminé. Le 1er février, il clamait : «Le régime sait qu’il est dictatorial. (…) Il faut qu’il accepte le passage à une transition démocratique…  Nous ne voulons pas un remaniement du gouvernement qui serait synonyme d’un changement à l’intérieur du système.   … » (1)
Six semaines plus tard, le nouveau Bouchachi contredit l’ancien et : « La démission de Abdelaziz Bouteflika n’est pas nécessaire…  Je pense qu’il faut être pragmatique : c’est un changement qui peut se faire avec le pouvoir. On peut envisager la mise en place d’un gouvernement de coalition nationale qui organise de vraies élections dans lesquelles tout le monde participera. » (2)
Le second point à retenir dans le plan de sortie de la crise d'Abelhamid Mehri est qu’il repose sur le renforcement de le « réconciliation ».
En effet, il propose d’« établir des ponts pour le dialogue et la concertation les plus larges avec les forces politiques pour préparer un Congrès national général qui aura pour mission, en plus de celle d’établir « l’évaluation critique et globale du système de gouvernance »  pour jeter les bases « d’un système démocratique et de l’Etat de droit », celle de « prendre les mesures nécessaires pour sortir le pays, définitivement, de la spirale de violence qu’il connait depuis vingt ans. »
Pour Mehri, « la crise, dont les effets continuent à marquer la scène politique, est la somme d’erreurs commises aussi bien par des mouvements islamiques que par les autorités de l’Etat dans leur traitement. Il est impossible de résoudre la crise en traitant la moitié de celle-ci et en occultant l’autre moitié. »
Lematindz – Service politique
1. El Watan 1er février
2. Entretien mercredi 9 mars par le site Maghreb Emergent (CNCD, Pouvoir, agenda du changement : Me Bouchachi s’explique sur tout),
A lire deuxième partie : L’initiative Mehri : la mise en scène

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