Sur la place du Conseil national, face à la mer, Marij tombe dans les bras de Hussein. Les deux hommes s'étreignent longuement alors qu'autour d'eux, des jeunes Libyens se mettent à danser, en criant leur haine du colonel Mouammar Kadhafi.
Agence France-Presse Benghazi |
Des hommes s'embrassent. D'autres pleurent en brandissant un drapeau libyen au milieu des klaxons, des tirs de kalachnikovs et de canons antiaériens. «Grâce à l'ONU, Kadhafi est fini», lance un jeune alors que des milliers de Libyens affluent dans le centre de Benghazi.
«C'est le plus beau jour de ma vie. C'est grâce aux Occidentaux, mais surtout au président Sarkozy. Nous n'oublierons jamais ce que la France a fait pour nous», dit, ému, Marij Bourahim, un employé du secteur pétrolier.
«Désormais, nous pouvons combattre jusqu'au dernier homme, voire jusqu'à la dernière femme», dit-il quelques minutes après le vote, jeudi soir, d'une résolution de l'ONU en faveur d'un recours à la force contre les troupes du colonel Kadhafi, ouvrant la voie à des frappes aériennes en Libye.
«Nous avions besoin de la zone d'exclusion aérienne, mais il faut surtout bombarder les infrastructures militaires à Tripoli, Syrte et Saha», explique Hussein Madani, un ingénieur de 48 ans, dont le frère est mort en 1996 dans la répression sanglante d'une mutinerie dans la prison d'Abou Slim, près de Tripoli.
Sur la place, pick-up, voitures, camions affluent dans un tonnerre de tirs et de feux d'artifice. Des enfants sont juchés sur le toit des voitures, des jeunes font la chenille. Sur la promenade, on lance de la dynamite dans la mer, créant des geysers d'eau de plusieurs mètres de hauteur. L'air marin, iodé, se mélange à l'odeur de l'explosif.
Le drapeau français côtoie le drapeau libyen. Il est deux heures du matin, et Benghazi n'a pas envie de dormir. L'ambiance de stade de foot un soir de finale de coupe du monde, les armes en plus, se prolonge.
Les feux d'artifice se multiplient dans le ciel de la «capitale» de l'insurrection. Un vieux monsieur pleure en souriant, les doigts en V brandis vers le ciel. «1,2,3, vive Sarkozy», chante un groupe de jeunes.
«Je suis sorti à cause du bruit dans la rue», dit Saad, un ingénieur de 47 ans. Dans la rue, des jeunes lui ont annoncé la nouvelle du vote à New York.
«Nous n'avons plus peur, nous avons eu assez peur pendant 42 ans. Désormais, je peux laisser mon fils de 12 ans, Youssef, partir se battre contre l'armée de Kadhafi. Je n'ai plus peur de l'aviation et de l'artillerie de Kadhafi qui a tué tellement de bons Libyens», explique Saad. A ses côtés, Youssef sourit. Son grand frère de 17 ans, Faraj, n'a qu'un mot à la bouche en enfant de la génération numérique: «Delete (efface en anglais) Kadhafi».
«Ce chien de Kadhafi n'a que des mercenaires, nous avons des patriotes. Nous allons récupérer Ajdabiya», martèle Saad, en référence à une ville à 160 km au sud de Benghazi, toujours sous le contrôle de la rébellion mais quasiment encerclée par les forces pro-Kadhafi.
«Maintenant, il faut que le peuple de Tripoli se soulève», conclut-il.
Sur le parking, les alarmes de dizaines de voitures, déclenchées par les rafales d'armes automatique, se mêlent aux klaxons. Des jeunes filles voilées de satin noir, des mères de familles, se promènent.
«On a appris la nouvelle en regardant Hurra», la chaîne de télévision en arabe financée par le Département d'Etat américain, sourit Ahmed, venu sur la place avec sa femme et ses trois enfants.
«C'en est fini des bombardements et de la souffrance. C'en est fini de la guerre. Notre victoire est totale. Kadhafi ne peut plus nous échapper», sourit-il.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire