Les anciens présidents de la République seront, fort probablement, reçus par Abdelaziz Bouteflika en personne et non pas par la commission que préside Abdelkader Bensalah. C’est en tout cas ce que suggère la réponse, donnée sur cette question, par Mohamed Ali Boughazi, lors de son point de presse hebdomadaire hier samedi.
Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - «Cela se fera dans un autre cadre», répondait en effet le porte-parole de l’Instance de consultations sur les réformes politiques à la question de savoir si les anciens présidents ont été conviés à se rendre au palais d’El Mouradia au même titre que tous les anciens hauts responsables algériens. Certainement pour des considérations protocolaires et considérant leur rang de chefs d’Etat, Ahmed Ben Bella, Chadli Bendjedid, Ali Kafi et Liamine Zeroual seront invités en tant que tels et, donc, à rencontrer Bouteflika. Mis à part Liamine Zeroual qui, depuis sa passation de consignes le 26 avril 1999, a mis un point d’honneur de ne plus rencontrer, sous quelque forme que ce soit, son successeur, Ben Bella, Chadli et Ali Kafi répondront certainement à l’invitation de Bouteflika. Depuis son retrait officiel du pouvoir, Zeroual s’est en fait imposé un mutisme et un effacement de la scène publique jamais remis en cause.
Une conduite qu’aucun autre président algérien n’a autant respectée : ni déclaration publique, ni apparition, fût-elle protocolaire. Seul Ali Benflis a eu le privilège d’être reçu par l’ancien président, chez lui à Batna, lors de la campagne électorale pour la présidentielle d’avril 2004.
Ceci, tandis qu’il déclinait systématiquement toutes les invitations, officielles ou officieuses, de son successeur. Au point où, même à chacune des visites de Bouteflika dans la capitale des Aurès, Zeroual venait exceptionnellement à Alger pour ne pas devoir à «croiser» l’illustre visiteur de Batna ! Ce qui n’est vraiment pas le cas des autres anciens présidents en vie de l’Algérie indépendante : Ben Bella, Chadli et Ali Kafi. Ces trois ex-chefs d’Etat ont d’ailleurs toujours honoré les invitations de Abdelaziz Bouteflika. Y compris Chadli Bendjedid, en dépit de la mémorable brouille entre les deux hommes au tout début du règne de Abdelaziz Bouteflika qui ne ratait, que l’on se rappelle, aucune occasion pour descendre en flammes et Chadli et sa présidence. «L’ère des présidents stagiaires, c’est fini avec moi !» proclamait Bouteflika en 1999. Et de tous, l’aversion qu’avait Bouteflika pour Chadli dépassait tout entendement ! Bouteflika se délectait publiquement lorsqu’il multipliait les formules assassines à l’endroit de celui qu’il accusait ouvertement de l’avoir privé de son droit «filiale» d’hériter de la présidence après la mort de Boumediène. Pire, il n’hésitera pas non plus à le tourner en dérision sur toutes les chaînes de télévision mondiales. «J’ai entendu dire que le président Mitterrand avait reçu le président algérien pendant dix heures. Connaissant les deux hommes, je sais que le président Mitterrand peut tenir une discussion pendant des heures sur tous les sujets. Mais je me demande ce que le président algérien a pu lui raconter, lui qui ne peut pas tenir une discussion de dix minutes pour dire des choses essentielles.» Cette réflexion de Bouteflika sur Chadli, faite sur une chaîne française en 1999, avait soulevé un tollé en son temps. N’empêche, les deux hommes ne s’évitent plus et Chadli sera certainement de la partie pour les consultations politiques en cours.
«Bouteflika suit le travail de la commission au jour le jour» Mohamed Ali Boughazi a tenu, par ailleurs, à rappeler que l’Instance de consultations sur les réformes politiques sanctionnera ses travaux par «un rapport qui sera soumis au président de la République». Pour lui, «l’Instance n’est pas un mécanisme de statistiques chargé de quantifier les propositions » mais son travail est fondamentalement politique en ce sens qu’elle va soumettre à Bouteflika un rapport détaillé contenant les grandes tendances qui se dégageront des consultations en cours. En attendant «naturellement, le président suit, au jour le jour, le travail de l’Instance». De même que les membres de l’Instance, à leur tour, «suivent avec intérêt les déclarations faites par ses invités. L’Instance tient à préciser que ces déclarations n’engagent que leurs auteurs». Boughazi annoncera, du reste, que les séances de consultations seront suspendues pour trois jours, «les 14, 15 et 16 juin, journées que nous allons consacrer à des réunions internes pour reprendre avec les rencontres le 18 juin prochain». Cette suspension des travaux est surtout motivée par les assises de la société civile qu’organisera le Cnes les 14, 15 et 16 juin.
K. A. (Le Soir d'Algérie)
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