L'ex-président tunisien Ben Ali et son épouse Leïla Trabelsi ont été condamnés lundi par contumace à 35 ans de prison chacun dans un procès où ils étaient poursuivis pour détournement de fonds public.
M. Ben Ali et son épouse sont également condamnés à payer des amendes de 65,61 millions de dollars.
Cinq mois après avoir été contraints de quitter le pays devant un soulèvement populaire sans précédent, l'ex-dictateur tunisien Zine el-Abidine Ben Ali a subi un premier procès par contumace, lundi, devant le tribunal de première instance de Tunis.
Un avocat de la défense, commis d'office, avait demandé d'entrée de jeu le report du procès, le temps, dit-il, de préparer la défense de celui qui a présidé à la destinée du pays pendant 23 ans.
L'ex-président Ben Ali et sa femme, Leila Trabelsi demeurent en Arabie saoudite, où ils ont trouvé refuge le 14 janvier. Le royaume wahhabite refuse jusqu'à nouvel ordre de les extrader.
Le couple était accusé « d'accaparement et détournement de fonds publics » et de « transfert illicite de devises étrangères », d'importantes sommes d'argent et des bijoux ayant été trouvés dans un palais à Sidi Bousaïd, dans la banlieue nord de Tunis.
M. Ben Ali était aussi accusé de « trafic et détention de stupéfiants à des fins de consommation », de « détention d'armes et de munitions » et de « non-déclaration de possession de pièces archéologiques ».
Ces dernières accusations ont trait aux découvertes effectuées dans le palais officiel de Carthage par la commission d'investigation sur les abus et la corruption, créée après la chute du régime.
Des dizaines de personnes se sont rassemblées devant le tribunal de Tunis où se déroulait le procès, scandant des slogans qui dénoncent une « mascarade » et une « parodie de justice ».
Photo: AFP/Fethi Belaid Plusieurs Tunisiens ont manifesté devant le palais de justice de Tunis. |
« L'important, c'est de traduire en justice ceux qui sont responsables de la mort de martyrs », a expliqué à l'AFP l'avocat Mohamed Abidi,faisant allusion aux quelque 300 personnes mortes pendant la répression de la révolte.
« Le gouvernement essaie de montrer que les choses ont changé. Mais rien n'a changé. Les criminels sont toujours libres. Ce procès est une pièce de théâtre », a-t-il lancé.
« Ce n'est pas vraiment un soulagement, ce procès : plus le juge lit, plus je me demande si on était dans un État ou un repaire de malfrats », a déclaré pour sa part Mokhtar Trifi, président de la Ligue tunisienne des droits de l'homme.
Les autorités ont déjà annoncé que pas moins de 93 chefs d'accusation avaient été retenus contre l'ex-président Ben Ali et certains de ses proches. Pas moins de 35 de ces chefs d'accusation doivent être traités par un tribunal militaire, dont ceux d'homicide involontaire et de conspiration contre l'État.
Ben Ali dit avoir été victime d'une ruse
Dans un communiqué envoyé par son avocat à l'Agence France-Presse, le président Ben Ali affirme qu'il n'a ni « abandonné » son poste, ni « pris la fuite », mais qu'il a été contraint au départ « par la ruse ».
« Cela ne veut pas dire que M. Ben Ali se considère encore comme le président de la Tunisie », a précisé à l'AFP son avocat libanais Akram Azouri.
Photo: AFP/Fethi Belaid L'ancien président, Ben Ali, et son épouse, Leïla Trabelsi (archives) |
M. Ben Ali soutient avoir quitté le pays le 14 avril, après avoir appris du directeur général chargé de sa sécurité, Ali El Siriati, qu'on voulait l'assassiner et que le palais présidentiel était encerclé.
« M. Ali El Siriati a insisté pour que j'accompagne ma famille à Jeddah pour quelques heures afin que les services de sécurité puissent déjouer le complot et garantir ma sécurité », explique-t-il.
« J'ai pris alors l'avion avec ma famille [...] mais après notre arrivée à Jeddah, l'avion est rentré à Tunis sans m'attendre, contrairement à mes ordres clairs », ajoute l'ex-président.
Je suis resté à Jeddah contre ma volonté. Plus tard, il a été annoncé que je m'étais enfui de Tunisie.
— Zine el-Abidine Ben Ali, par voie de communiqué
L'ex-président soutient par ailleurs que « l'objectif est de représenter la période précédente comme le mal absolu en vue de préparer les Tunisiens à accepter un nouveau système politique élaboré à leur insu par des extrémistes ».
M. Ben Ali dément par ailleurs avoir « donné l'ordre de tirer à balles réelles sur les manifestants ». Il affirme qu'il « ne possède personnellement aucun compte bancaire en dehors de la Tunisie, ni en Suisse, ni en Autriche, ni dans tout autre pays (....), ni de bien mobilier ou immobilier en France ou ailleurs ».
Il soutient que les bijoux de sa femme sont des « cadeaux officiels offerts par des chefs d'État » et que l'argent liquide qui aurait été saisi dans un de ses palais « a été déposé dans sa maison dans le cadre d'une mauvaise mise en scène montée [...] pour montrer que le président a mis la main sur les biens publics ».
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