En nommant l’un de ses proches à l’ambassade de France à Alger quelques semaines avant l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy a peut-être compliqué le projet de François Hollande de normaliser les relations franco-algériennes.
«Assainir, normaliser, apaiser et améliorer les relations entre la France et l’Algérie», c’est le message que le candidat François Hollande a fait passer à plusieurs reprises à ses interlocuteurs algériens et cela alors qu’il menait campagne.Bien informé de l’évolution du climat bilatéral, notamment par le biais de plusieurs personnalités algériennes proches du Parti socialiste, le nouveau président de la République française s’est donné comme priorité la nécessité de mettre fin aux bisbilles régulières qui ont aggravé les tensions entre Alger et Paris.
«Il y a plusieurs dossiers sur la table à commencer par les relations économiques et la perte de terrain des entreprises françaises en Algérie», confie un haut responsable algérien qui ajoute qu’un dialogue va «certainement être mis en place pour que cessent les attaques réciproques au sujet de la Guerre d’Algérie et du passé colonial».A cela, s’ajoute aussi la question des visas ainsi que celle du statut des binationaux. «Le dialogue entre nos deux pays n’a pas du tout été à la hauteur des enjeux» reconnaît un diplomate français qui confirme le volontarisme en la matière de François Hollande.
Il faut dire que ce dernier va bénéficier d’un a priori favorable. Longtemps, les dirigeants algériens se sont méfiés du Parti socialiste français, jugé trop atlantiste et trop favorable à Israël. De même, le rôle de François Mitterrand durant la guerre d’Algérie —où il fut ministre de l’Intérieur et ministre de la Justice— a toujours fait partie des griefs des Algériens.
«Les Algériens n’ont jamais oublié que Mitterrand a été l’homme qui a signé l’exécution de militants nationalistes. D’une certaine manière, cela a compliqué les relations franco-algériennes quand il était président», relève un journaliste algérois.
Une nouvelle génération de responsables socialistes
Un handicap dont ne souffrira pas François Hollande puisqu’il représente une nouvelle génération de responsables socialistes. A cela s’ajoute le fait, poursuit le journaliste, «que les dirigeants algériens actuels en ont soupé de Nicolas Sarkozy. Il a réussi à se mettre à dos des gens qui avaient applaudi à son élection».Pour autant, la voie n’est pas totalement dégagée pour François Hollande. Ce dernier, indique une source proche de son équipe de campagne, n’aurait guère apprécié qu’un proche de Nicolas Sarkozy ait été nommé ambassadeur en Algérie quelques semaines avant la tenue du scrutin présidentiel français. Il s’agit d’André Parant, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy pour les affaires africaines qui s’est déjà installé à Alger en remplacement de Xavier Driencourt.
Envisagé de suspendre l’accréditation
Chose étonnante, ce dernier n’était pas censé quitter son poste avant la fin du mois de juillet, de façon à être présent en Algérie pour les élections législatives du 10 mai ainsi que pour les cérémonies du cinquantième anniversaire de l’indépendance. En fait, il semblerait qu’André Parant ait insisté pour être installé au plus vite avant le deuxième tour de l’élection présidentielle.«Cette nomination est contraire à tous les usages», s’indigne un observateur algérien.Selon un diplomate algérien, Alger aurait envisagé de suspendre l’accréditation du nouvel ambassadeur français mais l’incertitude autour du résultat du scrutin français aurait éliminé cette option, les dirigeants algériens préférant éviter de prendre le risque d’une crise diplomatique en cas de réélection de Nicolas Sarkozy.
«Normalement, un poste d’une telle importance aurait dû attendre le résultat de l’élection présidentielle».
Et de relever au passage, «le signal désinvolte que Nicolas Sarkozy a adressé aux autorités algériennes en nommant un ambassadeur non-arabophone».
Du coup, à Alger comme au sein du Parti socialiste français, on se demande comment les relations entre les deux pays vont être améliorées alors qu’un sarkozyste est installé à l’ambassade de France à Alger.
Certes, François Hollande pourrait décider son remplacement mais ce serait donner des arguments à la droite qui, avant l’élection, avait agité le spectre de «l’épuration».
A moins, comme le suggère un diplomate algérien, que le passage algérois d’André Parant ne dure que quelques mois avant la nomination d’une personnalité plus proche de François Hollande.
Akram Belkaïd
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