mercredi 20 juin 2012

Algérie---FFS : trois anciens Premiers secrétaires accusent le parti de compromission avec le pouvoir

Le parti de Hocine Aït Ahmed se déchire et continue de s’enfoncer dans la crise. Trois anciens Premiers secrétaires du FFS ont appelé ce mercredi 20 juin dans une déclaration au rassemblement des militants pour sauver de l’implosion le plus vieux parti d’opposition en Algérie. « Conscients des implications désastreuses pour la démocratie et l'Algérie d'un abandon, par l'actuelle direction, des valeurs et idéaux du FFS, nous soutenons toute initiative allant dans le sens du rassemblement », note ce texte signé par Mustapha Bouhadef, Ali Kerboua et Djoudi Mammeri.

Le rassemblement « des énergies militantes du FFS est une absolue nécessité pour mettre en échec les velléités d'inscrire le parti dans des stratégies claniques dans la perspective des prochaines élections présidentielles », soutiennent‑ils. Ce rassemblement, ajoutent‑ils, sera l’occasion de débattre librement de la stratégie du FFS et de son organisation.
 
Cependant, les trois signataires suggèrent que certains au sein du parti – qu’ils ne désignent pas explicitement au demeurant – accusés de compromission avec le pouvoir, ne sont pas les bienvenus au sein de ce rassemblement projeté. « Les seules lignes de démarcation qui ne sauraient faire l’objet de concessions sont : porter profondément les valeurs et idéaux du FFS ; respecter le demi‑siècle de combat pour la démocratie et les libertés et honorer les quelques 400 martyrs et "les anciens de 63" et être autonome dans sa décision et sa liberté de penser et rejeter toute forme d'autoritarisme », affirment‑ils.
 
Cette sortie des trois ex‑responsables du parti, qui avaient déjà mis en garde contre les conséquences d’une participation du parti aux législatives du 10 mai dernier,  intervient alors que le doyen des partis d’opposition, menacé d’implosion, vit la plus grave crise politique de sa longue carrière. Pour eux, la direction actuelle cherche la normalisation avec le pouvoir. « Les tentatives de normalisation et de domestication du FFS, menées de l'intérieur et de l’extérieur, visent à neutraliser toute forme d'opposition radicale et pacifique et parachever la restructuration autoritaire du pouvoir ». Les trois ex‑dirigeants du FFS déplorent que leur mise en garde à la veille des élections soit restée lettre morte. « Nos appels, associés à de nombreuses autres voix, n'ont pas trouvé d’écho auprès des détenteurs du pouvoir réel au sein du parti. Ces mêmes personnes qui assurent la tutelle sur les organes de l'appareil du parti », écrivent‑ils, mais sans nommer le leader historique Hocine Aït Ahmed. 
 
 
« Grave dérive » et « appareil autiste » 
 
Dans leur violent réquisitoire, les trois ex‑responsables du FFS ont également qualifié de « grave dérive » le « deal » prétendument passé entre le parti et une aile du pouvoir. « Nous avons également mis en garde contre toute forme de velléité de compromission, et le coup de force politique du 10 mai est venu rappeler que les décideurs ont choisi la pérennité du système au détriment de l’Algérie, et de la stabilité politique ». Le « deal » suspecté avec une partie du pouvoir constitue « une grave dérive politique et une atteinte à l’éthique démocratique », notent‑ils.
 
Ils fustigent aussi la gestion du parti, notamment la communication marquée, selon eux, par une « indigence insondable » et s’interrogent sur le changement de « ton » vis‑à‑vis du pouvoir. « Ces élections ont mis à nu un appareil autiste, coupé de sa base militante, embourbé dans de flagrantes insuffisances et incohérences organisationnelles et marqué par une communication d'une indigence insondable et d'une confusion indicible. Ce scrutin, sans choix, a révélé des dirigeants du plus vieux parti de l'opposition curieusement très accommodants avec les maîtres du jeu électoral, et bien reconnaissants envers un généreux Conseil constitutionnel habituellement actionné uniquement pour valider les équilibres claniques et les violations récurrentes de la souveraineté populaire ».
 
Tout en apportant de l’eau au moulin de ceux qui, au sein de la base, soupçonnent la direction actuelle de vouloir réviser les fondements du parti et de remettre en cause ses repères, les trois ex‑dirigeants rappellent que le FFS doit rester un « instrument de cohésion et de rassemblement ».

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