mercredi 12 février 2014

BEN LADEN: L'ARMÉE AMÉRICAINE A ORDONNÉ LA DESTRUCTION DES PHOTOS DU CORPS

Une scène de transparence et de bon fonctionnement démocratique inimaginable en France vient de se produire aux Etats-Unis. Une ONG a demandé au Commandement des opérations spéciales des documents compromettants pour cette division du ministère de la Défense, qui plus est autour de l'opération la plus secrète et la plus sensible de ces dernières années, et les a obtenus.

Tout a commencé au lendemain de l'opération spéciale qui a entraîné la mort d'Oussama Ben Laden au Pakistan le 2 mai 2011, rapporte Associated Press. L'agence de presse avait elle-même demandé ce jour-là au commandement des opérations spéciales qui a supervisé le raid de publier «des copies de tous les emails envoyés depuis ou à destination de la boîte mail gouvernementale» de William McRaven, alors vice-amiral du commandement, évoquant Ben Laden.


publicité
Aux Etats-Unis, le Freedom of information act oblige depuis 1966 les agences fédérales à transmettre leurs documents à quiconque en fait la demande, avec quelques exemptions liées à la sécurité nationale et au secret défense. Quand une telle demande est faite, l'agence concernée est sensée conserver les documents en question, même si la demande est rejetée par la suite.

Mais 10 jours après la demande de l'Associated Press, McRaven fait exactement le contraire en ordonnant dans un email à ses subordonnés de détruire toute photo du corps de Ben Laden qui n'avait pas encore été remise à la CIA. Neuf mois plus tard, l'Associated Press reçoit une lettre du département de la Défense lui annonçant qu'aucun email de McRaven correspondant à la demande n'avait été trouvé.

L'affaire en reste là pendant plus d'un an, mais l'ordre de McRaven refait surface en juillet 2013 dans le brouillon d'un rapport des inspecteurs du Pentagone, entraînant de nouvelles questions de la part de la presse et de nouveaux démentis de la part de la CIA.

C'est finalement en réponse à une nouvelle demande sous le Freedom of information act, formulée cette fois par le groupe de surveillance des activités du gouvernement Judicial Watch, que le Pentagone a été obligé d'envoyer, le 31 janvier dernier, une copie du mail de McRaven, fortement expurgé. Pour le président de Judicial Watch, l'email est «une preuve tangible qui révèle un mépris de la loi et du droit du peuple américain à savoir».

La Maison Blanche avait décidé de ne pas publier les photos du corps de Ben Laden quelques jours après sa mort. Judicial Watch essaie depuis d'obliger le gouvernement américain à le faire, rapporte le site d'information politique The Hill, mais plusieurs décisions de justice ont jugé que celles-ci pouvaient rester classifiées.

Par Grégoire Fleurot
| publié le 12/02/2014
sur Slate.fr

Aucun commentaire: