La perspective de voir Donald Trump l’emporter se rapproche donc de plus en plus, au grand dam des responsables du parti républicain.
Une victoire de Donald Trump pour l'investiture républicaine apparaît de plus en plus crédible à l'approche du "Super Tuesday". Longtemps moqué par l'establishment du parti républicain, le milliardaire fait désormais rire jaune.
Il y a quelques semaines, la candidature de Donald Trump faisait encore sourire. Le magnat de l’immobilier devenu animateur d’un jeu de téléréalité avait beau caracoler en tête des sondages, personne, au sein de l'establishment républicain, n'imaginait qu'il puisse l’emporter aux primaires et beaucoup de stratèges du Grand Old Party (GOP) pariaient sur le fait que la baudruche se dégonflerait à temps. Le caucus de l’Iowa, lundi 1er février, les avait d’ailleurs confortés dans leur position. En arrivant pour ce premier test électoral derrière Ted Cruz et au coude-à-coude avec Marco Rubio, le candidat Donald Trump allait, croyaient-ils, bientôt s’effondrer.
Las, "The Donald", comme il est surnommé, a depuis remporté les primaires dans le New Hampshire, la Caroline du Sud et le Nevada. Pire, aucun autre candidat susceptible de lui barrer la route vers la nomination républicaine ne se démarque franchement. Jeb Bush a dû se rendre à l’évidence : son nom et sa personnalité, aux yeux des électeurs, font partie du passé. Et Marco Rubio, candidat préféré du parti, n’a pas réussi à s’imposer dans le moindre État jusqu'à présent.
Pourquoi le magnat de l'immobilier leur déplaît-il autant ? D’abord, ses dérapages ont choqué. Trop d’amalgames (notamment sur les musulmans ou les Mexicains), trop d’insultes à l’encontre de Jeb Bush ou John McCain, trop de prises de position en contradiction avec ce que prône le parti républicain, trop d’arrogance. Bref, trop de tout et pas assez de fond et de propositions détaillées.
Mais surtout, les positions du milliardaire sont assez éloignées de celles du GOP actuel. Il est notamment opposé aux traités de libre-échange, défend le planning familial, veut construire un mur à la frontière mexicaine et "déporter" les immigrés clandestins. En outre, il a déclaré qu’il adopterait une position "neutre" à propos du conflit israélo-palestinien. Le parti républicain, en revanche, souhaite davantage de libre-échange, veut réduire les subventions accordées au planning familial, compte adopter une ligne moins dure vis-à-vis des immigrés et prend systématiquement position en faveur d’Israël.
"Trump n’est pas un républicain"
"On met le doigt ici sur un problème de taille : Trump n’est pas un républicain, affirme au New York Times le sénateur de la Caroline du Sud Lindsey Graham, qui s’est retiré de la course à l’investiture en décembre. Et je n’ai aucune idée de la façon dont on peut faire la synthèse entre l’agenda de Donald Trump et l’agenda républicain. Comment parviendra-t-on à écrire un programme commun ?"
Or le temps presse pour voir un candidat plus en phase avec le GOP émerger de la course à l'investiture. Treize États doivent se prononcer, mardi 1er mars, lors du Super Tuesday. Si Donald Trump rafle la mise dans les principaux États ce jour-là, il sera difficile d’imaginer un soudain revirement de situation.
"Environ 25 % des délégués pour la convention ont déjà été choisis, donc la fenêtre de tir se referme, souligne à France 24 Ian Reifowitz, professeur d’histoire au SUNY Empire State College. Le problème pour Rubio, c’est que Trump a enclenché une dynamique avec ses trois victoires de suite et qu’il apparaît désormais comme un gagnant. Et plus il apparaît comme un gagnant, plus les électeurs indécis ont tendance à se rallier à lui."
"La tâche s’annonce vraiment ardue et les gens de Washington sous-estiment à quel point elle va l’être car ils n’ont cessé de sous-estimer Trump depuis le début", ajoute sur Politico l’ancien président de la Chambre des représentants Newt Gingrich, qui avait participé aux primaires républicaines en 2012.
Le Super Tuesday, dernière chance de voir émerger un autre candidat
Marco Rubio, Ted Cruz et les autres candidats ont parfaitement conscience de la problématique qui s’offre à eux. Leurs attaques se sont d’ailleurs presque exclusivement concentrées sur le favori des sondages, jeudi 25 février, lors du dixième débat télévisé des républicains. "Quel est votre projet ?", lui a ainsi lancé Marco Rubio avec une virulence qu'on ne lui connaissait pas, avant d’ironiser sur les formules toutes faites répétées à l’envi par le milliardaire durant ses meetings de campagne.
Ces attaques ont-elles permis de dépeindre Donald Trump comme un candidat sans substance, comme l’espère le parti républicain, ou bien ont-elles renforcé son image de candidat anti-système qui plaît tant aux électeurs ? Et surtout, cette stratégie a-t-elle permis à Marco Rubio, qui a les faveurs des leaders du GOP, d’apparaître comme le seul candidat en mesure de s’imposer face à Trump ? Pas certain, d’autant qu’un sondage publié avant le débat de jeudi soir donnait Trump vainqueur en Floride, l’État de Rubio, avec 44 % des voix contre 28 % seulement pour le sénateur du "Sunshine State".
"Si Marco Rubio ne gagne pas quelques États importants lors du Super Tuesday, je ne vois pas comment il pourrait ensuite rattraper Donald Trump, estime Ian Reifowitz. Clairement, le Super Tuesday représente la dernière chance de voir le nombre de candidats se réduire suffisamment pour qu’émerge quelqu’un capable de battre Trump."
L’establishment républicain retient donc son souffle. La candidature Trump encore moquée il n’y a pas si longtemps ne fait aujourd'hui plus rire personne.
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