lundi 18 juillet 2011

Libye – Syrie : Moscou en position défensive


Poutine Kadhafi
La guerre civile en Libye et la dégradation durable de la situation sécuritaire en Syrie préoccupent Moscou à plus d’un titre. Si la Russie avait vu d’un œil plutôt neutre les révolutions tunisiennes et égyptiennes, deux pays avec lesquels les relations se situent à des niveaux modestes, elle est bien plus inquiète de l’évolution des événements en Libye et en Syrie deux alliés de longue date et des clients importants de l’industrie militaire russe. Si la Syrie est un relais central dans la géopolitique du Moyen-Orient, la Libye constitue un élément important de la stratégie énergétique globale de la Russe.


Moscou avait signé avec l’italienne ENI, peu avant le déclenchement des troubles en Libye, un accord d’échange d'actifs afin d’obtenir la moitié de la participation d'ENI de 66 pour cent du gisement Eléphant en Libye. Pour sa part, ENI entrait dans plusieurs projets de développement de gisements de gaz  dans le nord-ouest sibérien. Cet accord se situait dans une logique d’implantation au Maghreb, source d’approvisionnement majeure de l’Europe. La Russie entendait ainsi construire une approche à plusieurs entrées du marché européen de l’énergie. C’est cette même approche géostratégique qui avait déterminé la présence sur le marché algérien de Gazprom (qui visait le rachat des actifs de BP dans ce pays), de Lukoil en Egypte, Tatneft en Libye. L’éviction du marché libyen de l’énergie serait un coup dur pour les russes qui déplorent la perte de contrats d’armements avec Tripoli estimés à plus de 4 milliards de dollars. Mais c’est sur le plan de la stabilité de son environnement géographique et donc de sa sécurité que Moscou exprime les plus vives préoccupations. Les dirigeants russes échaudés par les révolutions de « couleurs » dans leur étranger proche, Ukraine et Géorgie sont dans toutes les mémoires moscovites, se méfient de mouvements qu’ils considèrent comme beaucoup moins spontanés que ce que les médias occidentaux laissent penser. Pour le Kremlin, les violences en Syrie sont provoquées par des djihadistes soutenus financièrement par les pays arabes du Golfe et des opposants sponsorisés par les occidentaux. De même, les opposants armés libyens seraient noyautés par des salafistes, même si pour des raisons diplomatiques la position publique de Moscou est plus nuancée.

Des scénarios exportables vers l’Asie Centrale

Les scénarios déployés en Syrie et en Libye pourraient bien être exportés vers l’Asie Centrale ou même dans le Caucase, région instable ou le Kremlin déploie en permanence de très importantes forces de sécurité. Dans l’hypothèse de la consolidation de la position des talibans en Afghanistan, les régimes pro-russes d’Ouzbékistan, du Kazakhstan ou du Tadjikistan pourraient représenter les prochains théâtres des révoltes populaires. Le risque de contagion est d’autant plus réel que les régimes de ces pays, des dictatures policières dominées par la corruption et le clanisme, ont démontré leur incapacité à entreprendre les moindres réformes politiques et économiques.  La modernisation encouragée par Dimitri Medvedev n’a en effet eu que peu d’échos auprès des oligarques au pouvoir à Tachkent, Douchanbé où Astana. Les inquiétudes russes sont alimentées par le rôle de l’Otan en Libye et l’interprétation élastique, c’est un euphémisme, par la coalition anti-Khadafi de la résolution 1973. Le dépassement du mandat accordé par le Conseil de Sécurité constitue pour Moscou, un dangereux précédent de mise en œuvre du droit d’ingérence. Le Kremlin a la confirmation que l’Alliance atlantique est un instrument d’expansion militaire qui pourrait parfaitement se retourner contre les intérêts russes dans les régions ou l’influence de Moscou joue un rôle primordial depuis les Tsars.

Dilemme russe

Face à cette situation et pour éviter une marginalisation dommageable à tous points de vue, la Russie a décidé de tenter une médiation en Libye, de soutenir clairement Bashar al Assad en Syrie et de résister à toutes nouvelles pressions pour amener le Conseil de Sécurité à adopter des sanctions contre les régimes ciblés par les occidentaux. Le dilemme russe est perceptible et se résume à une question : la coopération avec l’Ouest est elle possible sans que les intérêts vitaux du pays ne soient mis danger ? La réponse n’est assurément pas simple même si les russes estiment qu’il serait contreproductif d’entrer dans des logiques de confrontations avec un partenaire-adversaire aux ambitions dévorantes. Les révolutions arabes placent la Russie dans une position défensive et montrent les limites d’une politique de puissance dont le Kremlin n’a pas vraiment les moyens stratégiques et diplomatiques. La concertation avec la Chine sur une position commune face aux manœuvres du bloc occidental est l’alternative à un cavalier seul que Moscou peine à assumer en dépit d’une volonté proclamée d’assurer un leadership mondial. La nostalgie de l’influence soviétique ne peut fonder une diplomatie aux contours clairs et identifiables, conforme aux intérêts de la Russie et aux réalités du rapport de force actuel.
SAÏD MEKKI    LUNDI, 18 JUILLET 2011 10:13 maghrebemergent.info/

1 commentaire:

Anonyme a dit…

gonflés ces russes, à pat vendre leur armes et déclencher des guerres civiles dans les pays riches en matières premières, je ne vois pas trop en quoi ils diffèrent des pays occidentaux. La prochaine guerre est en marche, ils vont pouvoir s'en donner à coeur joie... ils n'ont rien changé de leur mentalité finalement, malgré la chute du mur de berlin, ils se sentent encore dans cet espèce de bloc onis du monde... sans eux jamais on aurait eu l'intégrisme et le terrorisme cher à Bush ... pf tous les mêmes ces pourris