Virage à 180 degrés. Le Front des Forces socialistes (FFS) de Hocine
Ait Ahmed a annoncé vendredi 2 mars sa décision de participer aux
élections législatives du 10 mai. La participation du FFS était attendue
depuis que M.Ait Ahmed, réfugié en Suisse, a brusquement limogé en
novembre 2011 Karim Tabbou. La participation du FFS apportera au pouvoir
la caution démocratique qui maquait à ce scrutin.
Le Front des forces socialistes (FFS) participera aux élections
législatives prévues le 10 mai 2012, a annoncé vendredi le premier
secrétaire du parti M. Ali Laskri. « Le FFS a décidé de participer aux
prochaines élections législatives », a-t-il déclaré à la presse.
La dernière participation du FFS à des élections législatives remonte
à octobre 1997, largement remportée par le RND grâce à une fraude
massive.
Le parti a par la suite boycotté les législatives de mai 2002 et mai 2007.
Nécessité tactique
Le président du FFS, Hocine Ait Ahmed, installé en Suisse depuis
plusieurs décennies, est intervenu ce vendredi par vidéo devant le
conseil national pour justifier cette décision.
La participation du FFS, parti d’opposition créé en 1963, a-t-il expliqué, « est une nécessité tactique pour le FFS
et s’inscrit en droite ligne dans notre stratégie de construction
pacifique de l’alternative démocratique à ce régime despotique,
destructeur et corrompu ».
Le chef du FFS a donc tranché le dilemme qu’il évoquait récemment et
apporté un petit supplément démocratique à ce scrutin menacé d’une très
forte abstention.
Le dilemme d’Ait Ahmed
Dans un message adressé en février 2012 à ses militants, Hocine Ait
Ahmed avait qualifié l’attitude de son parti à l’égard du scrutin de «
dilemme ». Le boycott des législatives « ne constitue pas une
alternative efficace à la participation », estimait-il en considérant
que si le FFS décidait d’y participer, il ne pourrait pas assurer le
« changement démocratique ».
Ce brusque revirement du FFS surprend alors que son ex-premier
secrétaire national, Karim Tabbou, nommé en 2007 et dégommé le 18
novembre 2011, n’a eu de cesse de pilonner le pouvoir qu’il accusait de
mener le pays à la dérive.
Tabbou le virulent viré
C’est que depuis sa désignation en avril 2007, Karim Tabbou, 37 ans, a
installé le vieux parti dans une opposition radicale à l’égard du
pouvoir désigné par le vocable « système ». Ni le président, ni le
gouvernement, ni les généraux, ni l’opposition n’ont trouvé grâce aux
yeux de ce licencié en sciences économique au verbe tranchant, aussi à
l’aise en arabe, en kabyle qu’en français.
En mai 2011, il qualifiait ainsi de bricolages les réformes
politiques engagées par le président Bouteflika. « Aujourd’hui,
professait M. Tabbou, on nous parle d’ouverture, mais on ferme toutes
les portes, et ce qui est proposé est une démonstration que les
décideurs n’ont aucune volonté de changement vers la démocratie ».
Faux députés
En juin, il accusait encore la mafia d’avoir pris le contrôle du pays
en fabriquant de faux partis, de faux députés. « Le système a l’art
d’organiser le désordre pour créer une confusion à tel point qu’il a
donné une image d’une situation difficile à décrypter. Nous avons, entre
autres, de faux députés et même de faux partis. La mafia est plus
organisée que la société civile», disait-il.
Retour de la vieille garde
Cette position d’opposant virulent au pouvoir, voire même à l’égard
de l’opposition, aura vécue en novembre 2011 avec l’éviction de Tabbou,
la nomination d’Ali Laskri, jugé plus consensuel, moins radical. Elle
aura également vécue avec le retour au bercail de la vieille garde
(Samir Bouakouir, Dalila Taleb Ikhlef Bouaichi, Ahmed Djeddai, Djoudi
Mammeri..) écartés du parti après avoir été aux commandes entre 1997 et
2002, époque où le FFS siégeait à l’Assemblée avec 20 députés.
Comment expliquer ce virage à 180 degrés ? Comment expliquer que le
FFS apporte aujourd’hui la caution démocratique au pouvoir et aux
réformes de Bouteflika alors qu’il les a accablées durant presque une
année ?
Une si longue absence
Absent du parlement depuis dix ans, le FFS voudrait éventuellement
renouer avec les institutions, après dix ans d’absence, en portant
l’opposition à l’intérieur de l’Assemblée, plutôt qu’à l’extérieur.
Des cadres du parti souhaiteraient-ils s’assurer un statut de député
avec les privilèges qui vont avec. Enfin, la décision de participer
aurait été précédée d’un marchandage entre Hocine Ait Ahmed, et des
responsables algériens à Alger et en Suisse.
Des informations faisant état d’un voyage du vieux leader en Algérie
en mai 2011, rapportées par le Soir d’Algérie, n’ont pas été démenties
par le parti.
Virage donc à 180 degrés.
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